Deux précédents articles vous ont déjà présenté le domaine national de Chambord, territoire prestigieux de Sologne où François 1er avait choisi de faire édifier son relais de chasse, rien de moins que le plus prestigieux des châteaux de la Loire, bien que n’y ayant pourtant séjourné que 32 ou 34 jours selon les sources. Même si nombre de visiteurs semblent l’ignorer, Chambord ce n’est pas que ce chef d’œuvre majestueux de la Renaissance française. Loin s’en faut … Raison qui m’a poussé à vous inviter à une approche plus détaillée de sa faune et de sa flore.
Le parc du domaine et la Réserve Nationale de Chasse et de Faune Sauvage
Pour un chasseur, un amateur de nature, d’observation et/ou de photographie de la faune sauvage, c’est tout autour, dans l’écrin abritant ce joyau, pas moins de 5.540 hectares de pinèdes, chênaies, landes, marais, étangs, clairières et prairies (+/- 150 ha), ceints de 32 km de murs d’une hauteur de 2 mètres 50, que cela se passe.
Une zone, de plus de 1.000 hectares, est ouverte et librement accessible au public. On y trouve les aires de pique-nique, pistes cyclables et cavalières, circuits pédestres et VTT, aires d’observations et miradors. Par contre, la partie boisée la plus importante du domaine constitue la Réserve Nationale de Chasse et de Faune Sauvage, qui abrite cerfs, biches et faons ; sangliers, deux principaux groupes de mouflons, ainsi que des chevreuils particulièrement discrets.
Alors même qu’il n’est pas rare que beaucoup de visiteurs des aires d’observation se comportent comme s’ils se trouvaient dans un parc animalier, il convient de particulièrement insister sur le caractère totalement sauvage du nombreux gibier qui peuple le domaine ; bien que vivant et se reproduisant dans un espace clos, il y évolue dans la plus totale liberté.
Les aires d’observation et miradors
Afin de permettre au public de contempler la faune de Chambord, il existe cinq grands observatoires pouvant chacun accueillir une vingtaine d’adultes ; soit, au départ du château, deux à droite de la Route François 1er (direction Muides) : celui de la Pièce du Chêne, et, un peu plus loin, celui de la Gabillière ; deux de part et d’autre de la Route de la Commission (direction Thoury) : celui de la Ricaninière (à gauche) et celui du Rond Béatrix (à droite) ; le cinquième à proximité du parking 2 : celui du Rond Caroline.
Si l’on peut accéder au parking situé à quelques dizaines de mètres des quatre premiers avec un véhicule, même avec un camping-car, il n’en va pas de même pour le Rond Caroline, qui, pour être atteint, nécessite quelques centaines de mètres de marche au départ du parking 1, ou de celui réservé aux camping-cars et autocars, le parking 2, plus proche du Rond Caroline, n’étant ouvert qu’en cas d’affluence.
Quatre miradors plus petits sont également accessibles, deux de part et d’autre de la Ferme de la Hannetière – où répètent » Les Trompes de l’école de Chambord « , qui résonnent agréablement dans la forêt alentour les lundis et jeudis soir – accessible au départ de la Route François 1er, les deux autres : celui de la Canardière et celui de la Chapelle, étant situés le long du Cosson, rivière qui traverse le domaine. Un parking, atteignable via la Route de la Commission, est situé non loin de la Canardière, au départ du même parking, le second peut être atteint, après quelques centaines de mètres de marche, en franchissant puis longeant le Cosson, rivière qui traverse le domaine.
Observatoires et miradors sont installés en bordure de prairies de superficie variable jouxtant la forêt, où le gibier sort volontiers pour chercher sa nourriture, de nombreuses sortes d’oiseaux, rares sinon inconnues en Wallonie, lui faisant escorte, emplissant l’air de leurs chants et pépiements. Cependant, ne nous méprenons pas, il faut parfois faire preuve de patience et attendre un certain temps en silence, avant que du gibier n’apparaisse.
Toutefois, les aires d’observation et miradors ne sont pas la seule manière de découvrir le gibier.
Visite de la réserve de chasse en 4×4
Plusieurs fois par jour, selon des horaires affichés à l’accueil ainsi que dans l’agenda du site : http://www.chambord.org (il est prudent de réserver !), une visite de la réserve en 4×4 : Land Rover Defender pouvant emmener 8 passagers, d’une durée d’une heure trente environ, sur un trajet de 30/40 km, est organisée au départ de la place se trouvant près de la billetterie et du stand d’information, face aux différents commerces et à côté de l’hôtel du grand saint Michel.
En basse saison, on démarre devant l’entrée principale du château.
Bien qu’il soit parfois suppléé par un jeune collègue contractuel sympathique et compétent, le guide et chauffeur habituel est un forestier de l’Office National des Forêts (ONF), M. François Coutant, initiateur de la formule, attaché à Chambord depuis de nombreuses années, durant lesquelles il s’est acquitté de diverses missions, dont celle de coordonner l’entretien et la réfection des 32 km de murs ceignant le prestigieux domaine.
D’emblée, ce passionné, photographe aguerri et » canoniste » convaincu, connaissant le domaine et son histoire comme sa poche, c’est peu de le dire, vous communique sa passion et vous fournit une foule d’informations sur l’évolution du domaine au fil des siècles, ses anecdotes, la forêt solognote, ses spécificités, sa flore et sa faune, attirant notamment l’attention de ses passagers sur le fait que, malgré l’importance des populations après naissances (+/- 700 cerfs, 1.300 sangliers, 100 mouflons, 200 chevreuils), s’agissant de gibier totalement sauvage, sa rencontre n’est pas pour autant systématique et garantie, notamment en été lorsque la végétation est à son apogée.
Aussi, durant toute la randonnée, votre attention devra-t-elle être en éveil, si vous voulez déceler sa présence et vivre pleinement ces rencontres magiques, qui feront que vous repartirez chez vous des images et souvenirs merveilleux plein la tête, et contracterez peut-être, vous aussi, le virus de Chambord qui vous y ramènera plusieurs fois par an au fil des saisons, repartant chaque fois à regret avec un goût de trop peu.
Pourtant, il est évident que, s’il intéresse les hôtes de la réserve, le passage de la Land ne les perturbe pas, d’autant qu’il est strictement interdit d’en descendre, même pour réaliser » la » photo de ses rêves, le respect du gibier et de sa quiétude étant la règle lorsque l’on a le privilège de pouvoir pénétrer dans la réserve.
Le début du printemps, alors que la végétation commence seulement à reverdir, notamment les fougères, est particulièrement favorable aux rencontres, encore que les sangliers, se souvenant manifestement que les mêmes 4×4 ont été utilisés de novembre à mars pour poster les participants aux 13 battues en vue de les réguler, soient particulièrement méfiants et discrets à cette époque, cette défiance s’estompant néanmoins au fil des semaines.
Une halte à l’ancienne ferme de la Guillionnière permet de visiter la plus grande salle des trophées de cerf de France (400 pièces exposées), où vous aurez le privilège de découvrir l’évolution des bois d’un même cerf durant sept ans, avant celle dédiée au sanglier où l’on découvre de fort intéressantes vidéos, outre, comme dans la précédente, une multitude de trophées et des sangliers naturalisés, certaines fort impressionnants et étonnants.
Au fil de votre visite au parfum d’aventure, peut-être découvrirez-vous le pavillon de chasse du président Georges Pompidou, construit au bord de l’un des plus beaux étangs de la réserve.
Pour la petite histoire, après Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing a été le dernier président de la république à avoir régulièrement chassé et fait organiser des chasses à Chambord, ses successeurs ne partageant manifestement pas cette passion. Les miradors de battue que l’on peut encore voir le long des allées avaient d’ailleurs été édifiés à sa demande.
Peu avant la fin de votre périple en forêt, en point d’orgue vous aurez le plaisir de découvrir le balbuzard pêcheur, dont un couple niche chaque année depuis 12 ans à proximité de l’allée du Roi, d’où vous aurez une vue exceptionnelle et inédite sur le château, ainsi que les rois le découvraient au retour de la chasse.
A l’arrivée, comme pour toute chose que l’on a particulièrement appréciée, sans doute serez-vous, comme moi, envahi d’un énorme regret : que ces moments d’évasion et de découverte de la faune et de la flore au cœur d’un domaine exceptionnel, sous la conduite d’un guide sympathique et combien passionné et connaisseur, se terminent déjà !
Peut-être serez-vous, vous aussi, véritablement ensorcelé par ce havre de paix, et n’aurez-vous qu’une envie, y revenir pour, une fois encore, vous imprégner de ces moments hors du temps et de ces rencontres fugaces au parfum de mystère…